Le docteur Francis Deprez, les experts et les conflits d’intérêts
Un échange assez houleux entre l’ écolo Francis Deprez, Michaud Naud et Louis Marie
Houdebine a été publiée sur le blog de Marie Monique Robin. Le premier demandait fielleusement aux deux membres de l’AFIS « Pourquoi ne rendez-vous pas public vos conflits
d’intérêts ? » (1).
Ce genre de sous-entendu a par les temps qui courent valeur d’accusation formelle. Conflit d’intérêt signifie purement et simplement que les positions défendues par le biologiste Louis-Marie Houdebine et donc l’AFIS ne seraient pas le produit de convictions acquises au fil de ses travaux de recherche, mais de liens avec l’industrie semencière (Monsanto, bien sûr), autrement dit une accusation de corruption. En droit pénal, s’applique normalement la présomption d’innocence et le principe selon lequel la charge de la preuve appartient à l’accusation. Au-delà du droit, des gens dotés d’une probité minimale respectent ce principe : se refuser à porter une accusation d’une extrême gravité sur quelqu’un si on n’en possède pas la preuve à peu près indiscutable.
En matière de liens avec Monsanto imaginés par ceux qui cherchent à salir tous les gens qui ne partagent pas leurs préjugés, il est évidemment impossible à LMH de faire la démonstration qu’ils n’existent pas.
Observons bien la question telle qu’elle est formulée par Francis Deprez : il ne dit pas « Avez-vous des conflits d’intérêts ?» , ou bien « Je dispose de telle information qui tendrait à établir des liens entre LMH et Monsanto. Qu’avez-vous à y répondre ? ».
Il dit « Pourquoi ne rendez-vous pas public vos conflits d’intérêts ?», il affirme ainsi explicitement que ses liens existent mais que LMH et l’AFIS ne veulent pas les rendre publics ! L’accusation est nette et tranchée. On peut parier qu’elle ne repose sur rien, car si le docteur avait le moindre début de preuve , ça fait longtemps que lui ou d’autres les auraient rendus publics ! Des méthodes de tricheurs, comme le disent LMH et Michel Naud. Le mot est faible . On serait tenté de parler de gangstérisme intellectuel !
Cette vision policière permet de discréditer d’avance l’adversaire , de faire en sorte que ce qu’il dit ne soit plus examiné sous l’angle de la qualité des arguments, et permet également d’éviter que l’on se penche l’indigence de ses propres propos.
Postuler que toute position scientifique doit être examinée non pas sous l’angle de la vraisemblance, de la correspondance avec la vérité objective, mais en fonction d’intérêts supposés est typique de la sous-culture sociologique postmoderne. Elle rend impossible toute discussion, et c’est bien là son objectif. Mais après tout, le charmant docteur ne s’expose-t-il pas à un effet boomerang ?
Après tout, « dès que l’on se penche sur les grandes controverses telles que celles relatives à l’énergie nucléaire, aux OGM, au changement climatique, au clonage, ou même à la santé publique, et quelle que soit la position adoptée, on se retrouve souvent en compagnie « d’alliés », affichés ou non, dont la fréquentation souvent involontaire, ne manquera pas d’être stigmatisée. Les enjeux économiques sont tels qu’il y aura probablement toujours un acteur important ayant un intérêt particulier à faire pencher la balance d’un côté, et un autre de l’autre, organisant parfois un lobby de manière plus ou moins discrète. (2)»
En suivant la logique de Francis Deprez, nous devrions donc très logiquement supposer que ces prises de positions sont dictées non pas par des convictions, mais par ses intérêts. Et de lui demander à notre tour « Pourquoi ne rendez-vous pas public vos conflits d’intérêts ? ». Parce qu’ils existent forcément, si on le croit !
Par exemple :
-Pourquoi, compte-tenu de ses positions anti-nucléaires , ne rend-il pas publics ses liens avec Enron (Allemagne) , Nordex (Danemark), ou Vestas (Danemark), fabricants d’éoliennes ? Avec Sharp (Japon), premier fabricant mondial de panneaux solaires ? Avec Exxon(USA), Total(France) ,Shell (Pays Bas,Royaume-Uni) les grandes multinationales du pétrole ? Avec les trusts du charbon ?
-Pourquoi, compte-tenu de ses positions anti-OGM, ne rend-il pas publics ses liens avec La vie claire , La vie saine, ou mieux Carrefour, le financier des études anti-OGM « indépendantes » du CRIIGEN ? Pourquoi n’indique-t-il pas le nombre d’actions qu’il possède dans Diapason Commodities Management SA, le fonds spéculatif « non OGM » (5 Milliards de dollars, soit presque autant que le CA annuel de Monsanto ) ?
Bien entendu, nous sommes les derniers à croire à ce genre de stupidités. Nous ne faisons qu’appliquer à la lettre les principes de Francis Deprez , qui ne manquera pas de se retrancher derrière sa dignité effarouchée. Nous nous sommes prêtés à ce petit exercice uniquement pour pointer le caractère débile et malhonnête de ses propres accusations et de celles de ses acolytes.
Anton Suwalki
Notes :
(1) http://blogs.arte.tv/LemondeselonMonsanto/frontUser.do?method=getHomePage
(2) SPS . Les alliés . Editorial du numéro 280, Jean-Paul Krivine.