Réédition : le 23 mai 2017 , attaqué en diffamation par Christian Vélot, « Anton Suwalki » a gagné son procès
Je n’avais pas l’intention de donner dans le triomphalisme à propos de ce procès. Mais il se trouve qu’Isabelle Chivilo, membre du conseil d’administration du CRIIGEN, et homéopathe, trouve intelligent de me provoquer régulièrement sur Twitter à ce propos. Elle oublie toujours de préciser que j’ai gagné le procès. Il est donc temps de rappeler brièvement les faits.
Avertissement : je retranscris les faits plus d’un an après, en ne faisant appel qu’à ma mémoire. Lorsque je cite notamment les propos tenus par les témoins, ça ne peut donc pas être strictement textuel. J’espère en avoir respecté le sens. Si tel n’était pas le cas, ils peuvent toujours publier un commentaire pour mettre les choses au point.
C’set un article publié le 4 juin 2014, Faucheurs de porte-vigne transgéniques de Colmar : Christian Vélot, porte-parole de l’obscurantisme (1), qui m’a valu ce procès. Cet article faisait écho au sien, paru quelques jours plus tôt dans Bastamag (2), en défense des faucheurs volontaires qui avaient saccagé une parcelle d’essai de l’INRA à Colmar en 2010. Vélot, qui avait témoigné en leur faveur à leur procès, expliquait (sans rire) que les faucheurs avaient commis (sic !) « un acte salutaire ».
C’est finalement en compagnie du rédacteur en chef du webzine Contrepoints que j’ai été poursuivi en diffamation par Vélot. Contrepoints avait (avec ma permission) reproduit mon article le 10 juin. A ce titre, son rédacteur en chef était accusé de diffamation, et moi de « complicité de diffamation » ! Etant donné, comme l’a prouvé le procès, que j’étais clairement la seule cible de Vélot (ce qui est bien compréhensible), il nous faut expliquer cette bizarrerie.
Le délai de prescription pour un article paru sur Internet est de 3 mois. Or, comme l’explique la lettre d’Agriculture et Environnement de mars 2015 (3), la genèse de cette plainte a été assez laborieuse.
C’est en réalité Stéphane Foucart du Monde, qui est à l’origine du procès Vélot : « Le 9 juin (4) , soit cinq jours après la publication de l’article, [Foucart] prend donc l’initiative de contacter son ami Pierre-Henri Gouyon, un militant anti-OGM également membre du conseil scientifique du CRIIGEN. À cette occasion, il lui demande si lui ou Christian Vélot ont déjà envisagé d’entamer des poursuites pour diffamation contre ce site. Pierre-Henri Gouyon admet avoir préféré le mépris. Mauvais calcul, lui répond Stéphane Foucart, qui explique qu’un article sur le web laisse toujours des traces. (..)Pierre-Henri Gouyon transmet immédiatement l’avis de Stéphane Foucart aux membres du CRIIGEN, dont fait partie Christian Vélot. Précisant que le journaliste du Monde l’a fait réfléchir, il dit préférer opter pour une stratégie plus offensive. Non pas en raison de l’article en tant que tel, mais par la nature même du site, qu’il estime être malfaisant. »
Mais voilà, C Vélot ayant décidé de faire financer son procès par les faucheurs volontaires, il est vraisemblable que la somme qu’il espérait (15 à 20.000 euros !(5)) n’ait pas été réunie avant prescription, d’où la solution de secours qui consistait à se retourner contre le webzine Contrepoints.
Ils ont perdu leur procès, plus que je ne l’ai gagné.
Le procès a eu lieu devant la 17ème du TGI de Paris. Le rédacteur en chef de Contrepoints de l’époque, à l’étranger, était représenté par son avocat, Maître Christophe Bigot. J’étais venu sans avocat. Vélot avait 3 témoins : Daniel Brèthes, dont il fut un des anciens étudiants, Pierre-Henri Gouyon, et…Stéphane Foucart. De mon côté, j’avais apporté les témoignages écrits de deux spécialistes de biologie végétale , Philippe Joudrier et Marcel Kuntz.
Assistant à mon premier procès, et en tant qu’accusé, inutile de préciser que je n’étais pas très à l’aise, surtout dans une sale remplie de faucheurs volontaires, fort mal élevés !
Le procès a commencé vers 14 h 30 et s’est terminé à plus de 20 h. Stupeur du public lorsqu’à la fin, madame le procureur demande la relaxe. Ils n’avaient rien vu venir.
Je pense que tout s’explique par la ligne d’attaque choisie par mes adversaires. Tandis que j’assumais pleinement le contenu de mon article et tentait de le justifier au mieux, l’avocat de Vélot, Maître Bernard Dartevelle, a choisi de mettre en avant mon prétendu anonymat. Ce à quoi j’ai pu répondre tranquillement que mon identité était depuis très longtemps un secret de polichinelle. D’un , j’ai écrit des articles pour SPS, Economie matin ,Atlantico, sous mon vrai nom, Stéphane Adrover, avec à chaque fois mention de mon site. Deuxièmement, au moins l’un des témoins (Foucart) connaissait mon identité depuis 2010. Nous avions échangé des mails. De la pertinence ou de la non-pertinence de ce que j’avais écrit, il n’était nullement question pour mes accusateurs, qui ont préféré se concentrer sur des interprétations fumeuses de nature complotiste. Une fois de plus, on tentait de montrer l’ombre de Monsanto derrière le modeste rédacteur d’un blog artisanal. Visiblement, ça n’a pas convaincu les magistrats.
Mr Brèthes a témoigné en disant du bien de son ancien étudiant, ce qui me paraît tout à fait normal. Gouyon fut le seul à parler un tout petit peu de l’essai de l’INRA. « Ca ne marchait pas, ils ont quand même voulu poursuivre l’essai », a-t-il dit en substance. Il faut reconnaître que les premiers résultats des essais de l’INRA étaient plutôt décevants, mais cela ne justifie en rien les actions malfaisantes des faucheurs volontaires ! Gouyon a ensuite en gros désigné deux camps, à propos des OGM, le camp du mal, les biologistes moléculaires, liés aux semenciers et pro-OGM, et le camp du bien, les écologues, concernés par les risques que feraient peser les OGM sur la planète. Gouyon considère donc qu’il est dans le camp du bien, mais on s’en doutait un peu. Etant autorisé à lui poser des questions, je lui ai demandé où étaient les calamités prophétisées depuis plus de 20 ans par les anti-OGM. Ce à quoi il me répond glyphosate, et les pauvres paysans pollués par les OGM de Monsanto, et obligés de lui verser des royalties, évoquant sans la nommer, l’affaire Percy Schmeiser ! J’ai levé les yeux aux ciel, j'ai voulu répondre, mais la présidente m’en a empêché. Signalons enfin une énorme faute de goût de Gouyon, qui a mis en cause un scientifique pour de prétendus liens d’intérêt qu’il n’a pas. C’est pratique, lorsque les gens ne sont pas là pour se défendre !
Quant à Foucart, la nébulosité de son intervention fut totale. On a juste compris qu’il avait aussi des comptes personnels à régler avec moi, mais sa parabole autour du glyphosate et du CIRC a endormi l’assistance : il n’a pas une seule seconde évoqué le contenu de l’article pour lequel j’étais poursuivi.
J’ai donc pu développer mes arguments sans rencontrer de contradiction ou presque. Je dois dire que cela m’a beaucoup surpris.
Le jugement a été rendu le 23 mai 2017. Il a prononcé la relaxe. Vélot a fait appel dans un premier temps. J’ai finalement appris le 13 septembre son désistement.
Avant le procès, j’entendais les faucheurs, heureux, pour une fois qu’ils n’étaient pas sur le banc des accusés. Ma condamnation serait leur revanche. Il ne l’ont pas eue. A la fin de sa plaidoirie, Maître Dartevelle a cité en exemple le Tribunal international Monsanto (6) ! Voilà donc l’image de la justice que se font ces gens ! Cela fait froid dans le dos. Rien que cela me conforte dans la conviction qu’il faut continuer à leur tenir tête.
Pour terminer, special thanks to Isabelle Chivilo, sans qui je n’aurais sans doute jamais publié cette mise au point.
Anton Suwalki
- http://imposteurs.over-blog.com/2014/06/faucheurs-de-porte-vigne-transgeniques-de-colmar-christian-velot-porte-parole-de-l-obscurantisme.html
- https://www.bastamag.net/Vignes-OGM-quand-la-Cour-d-Appel
- https://www.agriculture-environnement.fr/2015/03/20/la-guerilla-judiciaire-du-lobby-vert
- souligné par moi : c’est à dire avant sa publication dans Contrepoints
- A & E mentionne plus de 5 000 euros récoltés en septembre, j’ignore encore à ce jour combien au total Vélot a fait perdre aux faucheurs volontaires. J’espère que c’est beaucoup plus.
- http://seppi.over-blog.com/2016/09/la-mascarade-du-tribunal-monsanto.html