Les OGM, pourquoi la France n’en cultive plus ? Un livre de Bernard Le Buanec

Publié le par Anton Suwalki

Les OGM, pourquoi la France n’en cultive plus ? Un livre de Bernard Le Buanec

Tout était bien parti pour les OGM en France. En 1979, un rapport commandé par le président de la république souligne les enjeux du génie génétique pour l’agriculture, domaine d’activité qui nécessite en permanence évolution et innovation. Après l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981, il n’y a pas de « rupture » dans ce domaine. L’Inra se dote d’une importante équipe de biologistes moléculaires. Des partenariats se nouent entre recherche publique et privée. Dans les années 1990, le nombre de dossiers déposés pour des plantes génétiquement modifiées augmente pour dépasser annuellement la centaine en 1997 et 1998. En 1997, le premier maïs génétiquement modifié (le maïs Bt 176 résistant à la pyrale) est autorisé en France par un gouvernement de gauche , dont le ministre de l’environnement est…écologiste. A cette époque, les gouvernements tiennent encore compte de l’avis (favorable) de leurs instances d’expertise.

Le vent a cependant commencé à tourner : La fin des essais nucléaires français dans le Pacifique décidée par Chirac coupe l’herbe sous le pied de Greenpeace auréolée de son image pacifiste, et prive en même temps la multinationale verte d’une bonne partie de ses ressources. Il lui faut donc trouver un nouveau cheval de bataille pour alimenter ses caisses. Un groupe de réflexion européen de l’organisation pressent, avec, reconnaissons-le, un indéniable flair politique, que l’opposition aux OGM pourrait être ce thème porteur. La première action de Greenpeace a lieu en 1996 aux Pays-Bas, contre le « soja fou », référence manipulatrice à la crise de la vache folle. En même temps que 15 variétés de maïs transgéniques sont inscrites au catalogue français en 1998, le gouvernement annonce un moratoire sur le colza et la betterave transgénique.

2008 : le président Sarkozy annonce la suspension de l’autorisation de culture du seul maïs transgénique alors cultivé en France, le MON 810. Il n’y a depuis plus de cultures commerciales de plantes génétiquement modifiées. Les projets de recherche, progressivement réduits à peau de chagrin dans les années 2000, ont été abandonnés.

Alors, les OGM, pourquoi la France n’en cultive plus ? Ingénieur agronome, docteur en biologie végétale, directeur des programmes de recherche chez Limagrain, actuellement membre de l’académie d’agriculture, Bernard le Buanec est un observateur privilégié de la problématique des OGM en France… et de leurs déboires. Dans ce petit livre paru aux Presses des Mines, il fournit une analyse très convaincante des causes de l’arrêt des cultures et des programmes de recherche de plantes génétiquement modifiées, causes que l’on ne saurait limiter aux seuls actes de vandalisme (1) des "faucheurs volontaires d'OGM", même si ces actions ont joué un rôle important. Bernard le Buanec souligne le rôle de la grande distribution, cette fraction du « grand capital » qui a choisi de surfer sur les méfiances envers les OGM (2) et sur la mode émergente du bio . L’auteur raconte aussi le rôle des médias dans le façonnage de l’opinion publique (nous parlerions volontiers de manipulation) , mais aussi, le revirement certain de l’INRA à la fin des années 1990, sous la houlette de Guy Paillotin. Enfin et surtout, les calculs politiciens qui ont abouti, lors du Grenelle de l’environnement, à négocier avec les organisations écologistes le moratoire sur le MON810, en échange de quoi, celles-ci étaient censées fermer les yeux sur la question de l’énergie nucléaire. Un accord de dupes, dommageable pour l’agriculture, et qui n’aura finalement dupé que les « fins tacticiens » qui en sont à l’origine. Les ONG ont pris ce qu’il y avait à prendre, sans pour autant renoncer à leur activisme anti-nucléaire, fût-il civil !

Contrairement aux politiciens, Bernard le Buanec a lui compris « la difficulté, voire l’impossibilité » du dialogue, l’utopie de la soi-disant « science participative » face à des groupes opposés par principe aux OGM, et guidés par la surenchère, la « prime de radicalité ».

Les dernières péripéties du Haut Conseil des biotechnologies (nous y reviendrons prochainement), ne fait malheureusement que confirmer ce diagnostic peu optimiste.

Un livre vraiment très utile, dont nous vous conseillons vivement la lecture.

Anton Suwalki

  1. De vandalisme, mais aussi de terrorisme intellectuel, comme le souligne Agnès Ricroch, elle aussi membre de l’académie d’Agriculture, dans la préface du livre)
  2. Le groupe Carrefour est allé jusqu’à autoriser la distribution de tracts anti-OGM dans ses magasins !
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
B
Using a stocks tip list like this is a smart move to make if you are inexperienced or don’t have the time to put towards analytics yourself like hardly any of us do.
Répondre
P
Il y a un procès en raison des procédés utilisés par vos amis pour discréditer vos opposants.<br /> Ils utilisaient vos articles comme référence. Or on ne peut pas dire qu'ils soient tout à fait objectifs. Sans compter sur vos liens avec une certaine droite.<br /> Qu'est ce que cela donne ?
Répondre
N
"directeur des programmes de recherche chez Limagrain"<br /> <br /> Le diable en personne. Enfin un petit Satan à défaut d'un grand puisqu'il n'a pas travaillé chez Monsanto.
Répondre
A
http://www.gmoseralini.org/la-communaute-scientifique-soutient-seralini-introduction/
Répondre
L
Merci pour cette recension.
Répondre