Du glyphosate dans l’urine : retour sur une mascarade des parlementaires européens
Le contexte :
Ce jeudi 19 mai, la Commission Européenne et ses états membres doivent se prononcer à propos du renouvellement de l’autorisation du glyphosate.
Cet herbicide non sélectif, vous ne pouvez l’ignorer compte tenu du matraquage médiatique, est le « plus vendu dans le Monde ». Bien que tombé que dans le domaine public en 2000, il a été mis au point par Monsanto, et continue d’être associé à l’incarnation du diable sur terre. Stéphane Foucart, dans le quotidien anti-pesticides de référence (1), ne manque jamais de rappeler que le glyphosate est « la molécule active du célèbre Roundup de Monsanto ». Enfin, le glyphosate est utilisé conjointement et à une large échelle avec des plantes génétiquement modifiées afin d’y être tolérantes.
Pour ces trois raisons, il est victime d’une campagne internationale visant à obtenir son interdiction, alors qu’on connaît par ailleurs son efficacité, son intérêt pour l’agriculture, et son profil éco-toxicologique plutôt favorable : certes, aucun produit n’est totalement inoffensif !
La campagne anti-glyphosate a redoublé d’intensité au cours de ces derniers mois, après la publication douteuse du Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC, émanation de l’OMS) classant l’herbicide comme cancérogène probable (2). Cet avis, de toutes façons, ne tenait pas compte des conditions d’exposition réelle au glyphosate, c’est-à-dire de la vraie vie. Après les avis des agences de sécurité européennes, puis celui de l’EPA américaine, c’est une communication conjointe de l’OMS et de la FAO (3) qui vient de désavouer celui du CIRC, sur lequel s’appuyaient évidemment les activistes anti-pesticides pour réclamer l’interdiction du glyphosate. « Au regard de l'absence de potentiel carcinogène chez les rongeurs à des doses humaines pertinentes, de l'absence de génotoxicité par voie orale chez les mammifères, et en tenant compte des données épidémiologiques de l'exposition professionnelle, les participants ont conclu que le glyphosate est peu susceptible de présenter un risque cancérogène pour l'homme de par l'exposition alimentaire », conclut l’avis OMS/FAO.
Cependant, pour les antis, l’absence de base scientifique pour justifier l’interdiction d’un produit est tout sauf un problème. L’utilisation des bonnes vieilles ficelles pour manipuler l’opinion est l’arme la plus efficace pour espérer peser sur les décisions politiques.
Frelatée, l’urine des parlementaires européens ?
On a donc appris que 48 parlementaires européens s’étaient volontairement soumis à une analyse d’urine, et que des traces de glyphosate avaient été détectées dans tous les échantillons (4) . Et alors ? Le glyphosate est un produit autorisée et largement utilisé. Il y a donc des résidus de glyphosate dans les aliments et les boissons que nous consommons. C’est plutôt l’absence de niveau détectable de glyphosate dans l’urine qui aurait été étonnante.
Reste à savoir si l’urine parlementaire est particulièrement frelatée. La presse rapporte que des parlementaires de toutes tendances se sont prêtés à ce qu’il faut bien appeler une mascarade. Un soupçon me vient à l’esprit .Se pourrait-il que la teneur en glyphosate de l’urine, dont les doses mesurées varient de 0,12 à 3,57 μg/L, soit un marqueur pertinent de la couleur politique ?
Inflexible dans sa ligne éditoriale anti-pesticides (5), Stéphane Foucart rapporte « des taux souvent élevés, la moyenne étant de 1,7 microgramme par litre (µg/l), soit dix-sept fois le seuil légal toléré dans l’eau potable. Les taux de contamination (sic !) les plus élevés sont plus de trente-cinq fois supérieurs à ce seuil. ». La belle affaire !
Le seuil légal toléré dans l’eau potable (0,1 μg/L), Foucart ne peut l’ignorer, ne correspond à aucun critère sanitaire. La valeur mesurée dans l’urine parlementaire la plus « frelatée » correspond à 5900 fois moins que la dose journalière admissible ingérable par un individu de 70 kilos (6) , et il n’y a même pas là de quoi embêter les coccinelles en faisant pipi sur le gazon. De plus, une concentration dans l’urine ne correspond pas à une valeur « d’exposition » et encore moins à une « contamination », contrairement à ce qu’écrit Foucart, mais à ce qui est excrété par l’urine, donc éliminé par l’organisme. Le glyphosate a un potentiel de bioaccumulation très faible, voire nul. Il est excrété en quasi-totalité au bout de quelques jours après ingestion (7) .
La manœuvre portera-telle ses fruits ?
A l’heure où ces lignes sont écrites, on ne connaît pas encore le résultat des tractations au sein de la Commission Européenne. On ne peut écarter que des coups médiatiques tels que ces « révélations » sur le pipi parlementaire puissent peser, au moins sur l’attitude de certains états membres. Si tel était le cas, cela en dirait long sur le degré d’indigence atteint par les décideurs politiques. Toujours est-il que cette pitoyable affaire n’a pas choqué la presse, et surtout pas Foucart, qui suggère aux eurodéputés belges à l’origine de la mascarade de «plutôt tenter de mettre la main sur des échantillons d’urine prélevés sur les ministres et les chefs d’États de l’Union »…La trajectoire normale de toutes ces manipulations, c'est celle de l'urine parlementaire : le caniveau.
Anton Suwalki
- http://imposteurs.over-blog.com/2016/03/le-monde-le-quotidien-anti-pesticides-de-reference.html
- http://imposteurs.over-blog.com/2015/04/le-glyphosate-le-circ-et-le-cirque-propagandiste.html
- Summary Report from the May 2016 Joint FAO/WHO Meeting on Pesticide Residues (JMPR)
- Pour obtenir l’analyse détaillée, chercher
« Members of the EU parliament excrete glyphosate with their urine”
- http://www.lemonde.fr/planete/article/2016/05/13/du-roundup-dans-l-urine-parlementaire_4919434_3244.html
- DJA du glyphosate : 0,3 mg/kg pc/j selon l’OMS
- www.glyphosate.eu