La permaculture, c’est perma-louche
Parmi les mouvements qui prétendent proposer des alternatives à « l’agriculture productiviste », avez-vous entendu parler de la permaculture ?
http://permaculturefrancophone.org/principes-de-design/
http://www.permaculturefrance.org/
Laissons les permaculteurs ou permaculturistes (sic !) la présenter :
« La permaculture est une science de conception de cultures, de lieux de vie, et de systèmes agricoles humains utilisant des principes d'écologie et le savoir des sociétés traditionnelles pour reproduire la diversité, la stabilité et la résilience des écosystèmes naturels. »
Vaste programme pour une seule science ! Comme toujours, la science alternative prétend supplanter la science tout court en allant chercher dans le passé les « savoirs traditionnels ». On ne s ‘étonnera donc pas que ses enseignements soient dispensées loin des universités classiques, mais dans une « université populaire ».
Mouvement folklorique, ou sectaire ?
D’un côté, les élaborations agronomiques de la permaculture ne paraissent pas bien méchantes, juste quelques banalités consternantes déguisées en trouvailles géniales et rassemblées sous le terme fumeux de Design. On ne s’étonnera pas que comme pas mal de charlatans, les théoriciens de la permaculture croient nécessaires d’envelopper leurs recettes à deux balles dans un jargon savant :
« Il faut aussi comprendre que l’énergie se transforme, mais ne se perd vraiment jamais. L’énergie du soleil rentre dans les plantes grâce à la photosynthèse, et ensuite se transforme encore quand nous ingérons cette plante… Il est toujours mieux de capturer l’énergie le plus tôt possible. Suivant le second principe de thermodynamique, quand il y a transformation de l’énergie, il y a aussi augmentation de l’entropie, c’est à dire une dégradation de la qualité de celle-ci. En bref, à chaque fois que l’énergie se transforme, elle perd de sa qualité et de sa force. L’énergie du soleil est moins forte (moins utilisable) dans une feuille de laitue et encore moins dans des crottes de lapin ». Mais , je dirais même plus, davantage dans une crotte de cormoran !
Peut-on trouver beaucoup de candidats à un mode de production et de vie archaïques ? S’il s’agit de faire des expériences à la Bouvard et Pécuchet, utiliser les poules pour désherber son jardinet, pourquoi pas ? Mais s’il s’agit de vivre de sa production, c’est déjà plus aléatoire.
Or ces archaïsmes « permacoles » sont présentés dans un projet global de micro-communautés alternatives à qui le directeur de l’Université populaire de permaculture, un certain Steve Read, , visiblement un « sage omniscient », promet « une vie abondante, saine, sûre et en harmonie ». Louche !
D’où viendrait donc cette « vie abondante » ? On retrouve à ce sujet l’anthropomorphisme de l’écologie profonde qui consiste à prêter à la nature des intentions correspondant à ses propres désirs :
« Pour prendre soin de la terre nous travaillons avec la nature et pas
contre, pareil avec la nature humaine, travaillons avec ! Les systèmes que
nous voulons transformer seront guidés, pas forcés vers l'harmonie et
l'abondance. Le principe éthique de redistribuer nos surplus est vraiment
différent des systèmes actuels et même historiques, c'est le principe du
pommier qui chaque année donne des centaines de kilos de pommes, comme ça. Il y a juste les petits pépins à l'intérieur que l'arbre veut distribuer et quand ils pousseront, il y aura encore plus d'abondance. »
Notre économiste distingué propose également une version très personnelle du multiplicateur keynésien, à travers le projet d’une monnaie locale : « Dans l'économie telle que nous la connaissons, en faisant nos courses dans les grands magasins et centres commerciaux, l'énergie que nous dépensons à gagner de l'argent est tout de suite dispersée dans les flux d'argent planétaires alors que très peu restera sur place, si ce n'est la part des salaires des gens qui y travaillent. Mais comme eux font également leurs courses dans ces mêmes magasins, leur argent aussi partira. Les AMAP et les monnaies alternatives sont par définition locales et donc tout ce qui y est dépensé, continuera à circuler dans la région, en créant ce que les économistes appellent un « effet multiplicateur ». Chaque fois que de l'argent/de l'énergie passe de main en main à l'intérieur du système en échange de services ou de produits, c'est comme si la valeur d'un sou d'origine se multipliait à chaque fois. » .
Or une monnaie locale, forcément non convertible, ne garantit qu’une seule chose, que tous les échanges aient lieu au sein du système clos où elle est admise. Dans un système archaïque, elle ne permettra d’échanger au plus (sans thésaurisation) que ce que le potentiel de production peut produire, c’est-à-dire pas grand chose.
Pour le reste : autarcie, spiritualisme, contrôle social étroit (sous couvert de communautés suffisamment petite pour que tout le monde se connaisse et pour éradiquer le crime et la délinquance), restriction programmée des possibilités de déplacements individuels (plus que quelques véhicules possédées par la collectivité), description étonnement précise et normative de maints aspects de la vie sociale pour un système qui prétend n’avoir de limites que l’imagination de ses créateurs : les « Bio-régions » ,« Perma-lieux » , « Perma-tones », etc.. et autres entités pittoresques de la permaculture ne sont peut-être pas les lieux de convivialité et d’harmonie que promettent ses promoteurs. Si l’intention sectaire n’est pas établie au départ, le risque de dérive sectaire, lui, existe bien.
Anton Suwalki