Arnaud Apoteker, nouveau directeur de la communication de Carrefour
C’est à grands renforts de publicité que
Carrefour a annoncé l’étiquetage dans ses magasins de 300 produits alimentaires animaux « nourris sans OGM » (1). Carrefour justifie cette initiative par le fait que les consommateurs
veulent être informés, s’appuyant sur un sondage que la chaine a commandé à Ipsos. En réalité, Carrefour ne fait que s’adapter aux peurs qu’elle a contribué à alimenter, et tente de les
convertir en monnaie sonnante et trébuchante. Carrefour prétend jouer le jeu de la transparence : c’est au contraire tromper cyniquement le client que de faire passer cela pour une
garantie de qualité et un bénéfice environnemental.
Bel aveu de la marque : « rien ne ressemble plus à un animal nourri sans OGM qu’un animal nourri avec des OGM » . Et pour cause, il n’y a aucune différence !
Les mensonges de Carrefour sont les mêmes que ceux de Greenpeace qui affirme dans son « Guide des produits laitiers avec ou sans OGM » (2): « Pour les français, plaisir gastronomique et produits de qualité ne peuvent se conjuguer avec les OGM. Mais ceux-ci sont pourtant omniprésents dans les assiettes de manière insidieuse. »
Greenpeace ne se cache d’ailleurs pas qu’il s’agit de sa propre victoire (3): « Greenpeace se félicite de cette initiative, qui fait écho aux différents guides publiés depuis des années par Greenpeace sur les « produits avec ou sans OGM » et qui palliaient l’absence totale de transparence et d’information sur cette question. »
Pour un juste équilibre entre les concurrents du lobbying vert, le site de Carrefour publie le témoignage de Gaëlle Bouttier-Guerrive , chargée de programme mode de vie durable et santé du WWF France.
« Les animaux d'élevage mangent plus souvent des tourteaux de soja que de l'herbe et des céréales. Or, la production de soja OGM représente 70% de la production mondiale et ses cultures grignotent la forêt amazonienne. La dissémination des OGM dans l’environnement menace de plus en plus la biodiversité sauvage et agricole, mais également notre sécurité alimentaire. Les cultures OGM, présentent de réels risques liés à une sur-utilisation de pesticides. »
Outre les âneries habituelles sur les risques de dissémination ou pour la sécurité alimentaire, le soja OGM est coupable de … grignoter la forêt amazonienne !!! Toutes les techniques d’amalgame les plus absurdes sont bonnes, lorsqu’il s’agit de dénigrer les OGM.
C’est néanmoins Arnaud Apoteker, responsable des campagnes anti-OGM de Greenpeace France qui s’est chargé d’aller faire de la publicité pour Carrefour dans le journal de 13 heures de France 2. Saluant l’initiative de la grande chaine de distribution, et affirmant toute sa confiance sur les mesures mises en œuvre pour garantir la « traçabilité » et le choix du citoyen.
Il devient difficile de savoir qui contrôle qui , quand Apoteker se transforme en directeur de communication de Carrefour, qui finance les études du CRIIGEN, dont le principal donneur d’ordre est Greenpeace….
Ce genre de pratiques où s’entrelacent militantisme et business n’est pas une première du genre : en 2009, la WWF (et David Servan-Schreiber) avaient fait campagne contre l’eau du robinet, conseillant « aux personnes malades du cancer ou qui sont passées par la maladie de ne boire quotidiennement de l’eau du robinet que si elles sont sûres de sa qualité, et sinon de s’équiper d’un filtre de qualité ou de boire de l’eau en bouteille » (4). Cela n’est sans doute qu’un hasard si la WWF et le groupe Danone (propriétaire des marques Evian, Volvic et Badoit) sont partenaires de projets auxquels le géant de l’agroalimentaire français versent plusieurs centaines de milliers d’euros annuels…
Pour conclure, remarquons que dans l’argumentaire visiblement écrit par les idéologues de Greenpeace , Carrefour défend l’idée que la séparation entre filières traditionnelle et transgénique devrait être payée par les producteurs d’OGM :
«La levée du moratoire sur les cultures d'OGM en Europe implique qu'une stricte ségrégation soit maintenue entre cultures conventionnelles et cultures transgéniques, ce qui n'est pas sans conséquence financière. C'est pourquoi Carrefour défend l'idée que les surcoûts de cette séparation n'ont pas à être supportés par l'agriculture conventionnelle mais plutôt par la filière agricole transgénique. »
Les producteurs même conventionnels, qui dénoncent régulièrement les marges exorbitantes de la grande distribution qui les étouffent, ne se laisseront peut-être abuser si facilement par cette démagogie.
Anton Suwalki
(1) http://www.carrefour.fr/2333-article-sans-ogm.htm
(4) http://www.agriculture-environnement.fr/spip.php?article553