Une grande découverte de Séralini : les mâles et les femelles, c’est pas pareil .
Ces derniers mois, Gilles Eric Séralini et le CRIIGEN tentent d’occuper le terrain médiatique, avec plus ou moins de réussite. Après une nouvelle publication de Séralini et ses collaborateurs sur les effets supposés du RoundUp (1), un article paru début juillet 2009 est passé relativement inaperçu :
How Subchronic and Chronic Health effects can be Neglected for GMOs , Pesticides or
Chemicals (2).
Derrière cette discussion qui se veut générale, et l’appel récurrent à des tests de toxicité plus longs, Séralini
s’applique surtout à justifier deux ans plus tard son article largement décrié au niveau national et international sur le nourrissage de rats au maïs BT MON 863 (3) . Le style « exotique » de
Séralini transparaît dans de nombreux passages :
-On constate la répétition mot pour mot de formules employées dans ces conférences militantes : par exemple, « les
OGM qui contiennent des pesticides, soit parce qu’il les tolèrent, soit parce qu’il les produisent » .
- Tous les biais méthodologiques de ses statistiques unanimement dénoncés sont purement et simplement ignorés. Avec un
aplomb certain, il légitime le nettoyage auquel il a procédé afin de rendre statistiquement significatifs des résultats qui ne le sont pas ou qui n’ont aucune signification biologique (4). A
l’inverse, il appelle à des « tests standardisés plus sérieux », lui qui rejette les standards établis au niveau international et fait des traitements statistiques fantaisistes !
Pour justifier ses résultats contradictoires, GES invoque des relations non linéaires de dose à effet et/ou non linéaires
dans le temps. Sauf qu’entre non linéarité et effets sans relation avec la dose, il y a des kilomètres, qui lui échappent peut-être ? Selon Séralini , certaines paramètres correspondant à des
perturbations hormonales se présenteraient sous la forme de courbes en J ou en U. Fouillez donc votre pharmacie. Si les hypothèses de Séralini sont exactes, il faut s’attendre à ce que la notice
de certains de vos médicaments indique :
Posologie : 200 mg ou 500 mg. En cas de prise accidentelle de 350 mg, veuillez
consulter d’urgence votre médecin.
Une seule innovation majeure dans cet article : GES a découvert 2 ans après son étude invalidée par la communauté
scientifique internationale un nouveau traitement statistique censé justifier les résultats contradictoires obtenus selon le sexe des rats nourris au maïs transgénique : Et là, stupeur , nous
avons droit à 2 superbes graphiques dont les enseignements vont probablement bouleverser la science : GES a découvert en gros que les mâles et les femelles, c’est pas pareil. Etonnant, non
?
Pour arriver à ce truisme confondant, GES a confié à un mystérieux François Roullier la tâche de faire une analyse en
composantes principales des paramètres hépatiques et rénaux des rats testés lors de l’étude sur le MON 863 . Curieusement, l’auteur de cette contribution majeure ne figure pas parmi les
signataires de l’article, et sa qualité n’est même pas mentionnée !
Cette technique statistique d’analyse des données est utilisée pour étudier une population selon de nombreux paramètres,
et établir une typologie des individus selon les caractères les plus discriminants et leur corrélation
entre eux.
Ainsi une étude d'individus selon les conditions de travail permettrait par exemple de discerner nettement en fonction du niveau d’autonomie dans le travail, de la variabilité horaire, de
critères de pénibilité physique etc.. le groupe des cadres supérieurs et celui des OS.
Dans le cas des paramètres biologiques étudiés par GES, deux groupes se distinguent nettement : les mâles et les
femelles. Et alors ? GES ne fournit aucune clé de lecture pour réinterpréter les résultats de son analyse de 2007 à la lumière de ces 2 graphiques, il se contente de suggérer qu’ils fournissent
une explication . « This demonstrates the clear separation of parameters values according to sex ».
On note que ces différences en apparence spectaculaires entre mâles et femelles sont en
réalité sans dimension de par même la méthode de représentation utilisée : il suffit que les individus représentés ne soient pas des clones pour obtenir une telle représentation. On choisit en effet la projection qui maximise la distance entre individus.
Nulle part n’apparaissent sur les deux graphiques des nuages distincts pour les rats nourris au MON _863 et pour les autres. Si cela n’est pas mis en évidence, on peut être sûr que c’est parce que GES n’a rien trouvé de ce côté-là, ce qui réduit encore la portée de cette nouvelle trouvaille statistique de Séralini.
Bilan de cet article : néant. C’était bien la peine d’attendre deux ans pour accoucher… d’une souris.
Anton Suwalki.
Notes :
(1) Glyphosate-based herbicides are toxic and endocrine disruptors in human cell lines.
Toxicology 2009
(2) International Journal of Biological Sciences
http://www.biolsci.org/v05p0438.htm
(3) New analysis of a rat feeding study with a genetically modified maize reveals signs
of hepatorenal toxicity. 2007.
(4) Lire notamment :
http://imposteurs.over-blog.com/article-29829309.html
http://imposteurs.over-blog.com/article-30006464.html