Le contrôle des OGM avant leur mise sur le marché par Philippe Joudrier (2ème partie)
3) L’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments : AFSSA http://www.afssa.fr
Cette agence a été créée en 1999 et a en charge, notamment, l’évaluation des OGM destinés à la consommation humaine et/ou animale.
Avant 1999, une instance existait déjà en charge d’évaluer les OGM, il s’agissait du Conseil Supérieur d’Hygiène Publique de France (CSHPF).
Développons le rôle de l’AFSSA concernant l’évaluation des OGM préalable à leur mise sur le marché.
3-1) organisation de l’évaluation en comités d’experts spécialisés
10 comités d’experts spécialisés (CES) ont été mis en place en charge des thématiques suivantes :
Nutrition humaine, Microbiologie, Biotechnologie, Résidus et contaminants chimiques et physiques, Alimentation animale, Additifs, arômes et auxiliaires technologiques, Santé animale, Matériaux au contact des denrées alimentaires, Eaux et Encéphalopathies subaiguës spongiformes transmissibles (ESST)
C’est le CES de Biotechnologie qui est en charge de l’évaluation des OGM.
Ce CES comprend, actuellement, 19 experts qui couvrent les différents champs de compétence suivant :
Biochimie, Génie génétique, Biologie Moléculaire, Agronomie, Génétique et amélioration des plantes, Microbiologie, Nutrition animale, Enzymologie/Préparations enzymatiques, Procédés technologiques, génie de la fermentation, Toxicologie alimentaire, Allergologie, Transgénèse.
Il a en charge l’évaluation des PGM mais également celle des auxiliaires technologiques (enzymes principalement) produits par des micro-organismes (ceux-ci pouvant être génétiquement modifiés ou pas).
L’AFSSA a repris le travail initial du CSHPF et a proposé des Lignes Directrices (LD) qui permettent au pétitionnaire (producteur d’auxiliaire technologique et semencier) d’établir son dossier de demande d’autorisation.
Ces LD ont d’ailleurs été reprises par l’EFSA ce qui a eu comme effet de conduire à une quasi homogénéité des informations requises dans les dossiers.
Avant d’aborder le contenu de ces LD, il est important de préciser les points suivants :
- l’évaluation de chaque dossier est collective,
- l’évaluation est donc, de ce fait, pluridisciplinaire,
- l ‘évaluation est réalisée selon une démarche qualité (selon un guide de bonnes pratiques d’expertise collective (BPEC) ),
- les experts doivent faire une Déclaration Publique d’Intérêts (DPI) qui peut donc être connue de tous.
3-2) contenu des Lignes directrices
Voici, de manière succincte, les informations obligatoires devant figurer dans les dossiers de PGM qui se déclinent selon trois champs principaux :
1 Information relative à la modification génétique
1.1 Description des méthodes utilisées pour la modification génétique
1.2 Nature et source du vecteur utilisé
1.3 Taille et fonction attendue de chaque fragment de la région insérée,
source de l'organisme donneur
2 Information relative à la plante génétiquement modifiée (PGM)
2.1 Description du ou des caractères et caractéristiques de ce qui a été introduit ou modifié.
2.2 Informations relatives aux séquences insérées ou délétées.
2.2.1 Taille et structure de l'insert et méthodes utilisées pour sa caractérisation, y compris les informations sur les parties du vecteur introduit dans la PGM ou tout ADN étranger ou ‘porteur’ restant dans la plante.
2.2.2 En cas de délétion, taille et fonction de la région délétée,
2.2.3 Nombre de copies de l'insert,
2.2.4 Localisation de l'insert dans les cellules végétales (intégré dans le chromosome, chloroplaste, mitochondrie ou maintenu sous une forme non intégrée) et méthodes de détermination,
2.3 Information relative à l'expression du (des) gène(s) inséré(s)
2.4 Stabilité génétique de l'insert et stabilité phénotypique de la PGM.
2.5 Evaluation du risque liés aux gènes insérés (capacité de la PGM à transférer du matériel génétique à d'autres organismes.
3. Evaluation des risques alimentaires pour l'homme et l'animal de la PGM
Recommandation générale : l'évaluation du risque d'un nouvel OGM dans tous ses aspects se fera toujours par comparaison avec la plante ou ses produits issus d'un référentiel approprié (conventional counterpart, ou produit "isogénique").
3.1 Description du produit et utilisation prévue.
3.2 Origine des produits de gènes utilisés pour faire l'évaluation de risque.
3.3 Evaluation des modifications potentielles dans le métabolisme de la PGM.
3.4 Evaluation de la composition nutritionnelle et des modifications inattendues (concentration en nutriments, facteurs anti-nutritionnels et substances toxiques).
3.5 Evaluation de la toxicité du produit de gène :
tests de toxicologie aiguë et sub-chronique.
3.6 Evaluation de la tolérance sur l'animal de l'aliment produit à partir de la PGM = test d’alimentarité.
3.7 Dégradation dans le tube digestif.
3.8 Evaluation du potentiel allergène.
Pour donner des exemples plus précis, voici une liste de points qui sont contrôlés sur les OGM par rapport aux non-OGM :
OGM non-OGM
Toxicités aiguë et sub-chronique oui non
Recherche de toxines oui non
Tests de génotoxicité* : oui non
Clastogénèse et mutagenèse
oui non
Allergénicité potentielle évaluée oui non
Microéléments (oligoéléments) oui non
Macroéléments (protéine, lipides sucres) oui partiel
Teneur en métabolites particuliers oui parfois
Tolérance et valeur alimentaire oui non
Date de floraison oui pas systématiquement
Quantité de pollen oui ‘’
Croisement avec plantes apparentées oui ‘’
Persistance des graines dormantes oui ‘’
Résistance aux stress oui ‘’
* réalisés sur les MGM, pas nécessairement tous d’ailleurs.
Pour la composition biochimique (point 3-4), qui reprend le concept d’équivalence en substance, les éléments suivants sont renseignés :
La Matière Sèche,
la teneur en cendres,
les Parois cellulaires,
Les Fibres digestibles,
Les Protéines et les acides aminés,
Les Lipides et acides gras,
Les Sucres : amidon (amylose, amylopectine), fructose, glucose, saccharose…,
Les Glycoalcaloïdes : chaconine, solanine, …,
Les Micro-éléments : Na, K, Ca, Mg, P, Fe, Zn, Cu, Mn, Cd…,
Les Nitrates,
Les Vitamines,
Les Métabolites secondaires : Acide Phytique, chlorogénique, férulique, inositol, raffinose, acide p-coumarique…,
Et ce, de manière systématique sur plusieurs échantillons : lieux et années de culture…!
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( à suivre)