Le contrôle des OGM avant leur mise sur le marché, par Philippe Joudrier (1ère partie)

Publié le par Anton Suwalki

(*) Merci à Philippe Joudrier qui a rédigé pour Imposteurs un exposé détaillé des procédures d'évaluation des OGM, qui sont particulièrement rigoureuses et pointilleuses, contrairement aux idées répandues par les "anti". AS
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Contrôle des OGM avant leur mise sur le marché.

Par Philippe Joudrier
Chargé de mission INRA, expert OGM à l'Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments

 

EVALUATION DES OGM

Disons tout d’abord un mot sur la réglementation :

De très nombreux textes européens (Directives et Règlements) concernent directement les OGM :

23/04/1990 : DIRECTIVE 90/220/CE

18/06/1997 : DIRECTIVE 35/97/CE

26/11/1997 : MODIFICATION DE LA 220/90/CE

26/05/1998 : règlement 1139/98/CE  

(Abrogation du règlement 183/97/CE DU 01/11/1997)

10/01/2000 : REGLEMENT 49/2000/CE : complète 1139/98 en définissant un niveau de tolérance (1%).

10/01/2000 : REGLEMENT 50/2000/CE additifs et arômes alimentaires

18/2001/CE : Directive : Utilisation d’OGM pour l’alimentation animale

15/07/2003 : REGLEMENT 1946/2003 commerce des OGM

22/09/2003 : REGLEMENT 1829/2003 : denrées alimentaires  (Homme & Animal)

22/09/2003 : REGLEMENT 1830/2003 : traçabilité et étiquetage (modifie 18/2001), Seuil  baissé à 0.9%.

La future Loi sur les OGM visent essentiellement à transposer en droit français la fameuse directive 2001/18.

L’absence de transposition n’a cependant pas empêché les instances concernées de satisfaire à cette réglementation ni aux suivantes.

Il n’est pas question ici de développer chacune de ces réglementations.

On peut remarquer que la première Directive les concernant date de 1990, c’est-à-dire bien avant l’arrivée des premières PGM commercialisées (1994 aux USA, 1997 en Europe). Ce qui montre qu’on a commencé à s’en préoccuper bien avant leur arrivée sur le marché.

Mais outre ces réglementations spécifiques pour les OGM, il en existe d’autres plus générales auxquelles évidemment les PGM doivent aussi satisfaire :

* Ainsi le règlement « Nouveaux aliments »  258/1997 (15/05/1997) plus connu sous le nom de Novel Foods.

* Le Règlement 178/2002 qui fixe les procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires. Pour faire simple, aucun industriel ne peut mettre un produit sur le marché que s’il ne présente aucun danger(actuellement connu) pour le consommateur.

* Enfin au niveau international, il existe le Codex Alimentarius de l’OCDE qui les prend en compte.

On peut donc d’emblée dire que les OGM, en Europe, doivent satisfaire à la réglementation certainement la plus contraignante au monde avant de pouvoir être mis sur le marché.

Pourtant, de nombreux documents ignorent purement et simplement toute cette phase, laissant penser que le scientifique « apprenti sorcier », jouant avec la « nature », irresponsable etc… met dans l’environnement et sur le marché un OGM dès qu’il l’a obtenu… !  Je ne pense pas que l’on puisse trouver les informations qui vont suivre sur aucun des sites anti-OGM. On devine bien pourquoi !

On est très loin du schéma caricatural et mensonger par omission du discours anti-ogm.

Prenons l’exemple de l’état Français en décrivant ce qui est fait jusqu’en juillet 2007, car avec la future Loi sur les OGM, des modifications, au moins de forme et d’appellation vont intervenir.

Cinq instances sont en charge de l’évaluation et du suivi des OGM (dont quatre spécifiques) :

1) La Commission du Génie Génétique : CGG

            En charge du confinement des expérimentations.

Tout laboratoire faisant du génie génétique est nécessairement conduit à faire et/ou utiliser des OGM. Il doit alors remplir un dossier décrivant ses projets, ses moyens (biologiques et matériels). La CGG autorise les expérimentations en précisant un degré de confinement pour pouvoir réaliser les expérimentations. Plus elles sont jugées comme potentiellement dangereuses, plus le niveau de confinement à respecter est élevé.

Exemples : un laboratoire qui voudrait faire des manipulations génétiques sur le virus de l’hépatite B ou le virus Ebola ou encore H5N1 responsable de la grippe aviaire ne pourrait le faire que dans un labo dont les niveaux de confinement sont extrêmes (type P3 et/ou P4).

Les laboratoires P4 sont des structures dans lesquelles les opérateurs travaillent en scaphandre (système respiratoire autonome), le laboratoire et les hottes sont sous dépression, avec un sas + douche pour y accéder… bref, des précautions extrêmes pour éviter toute contamination à l’intérieur et vers l’extérieur. Deux laboratoires de type P4 existent en France (Paris et Lyon).

Le coût d’utilisation de ces outils est extrêmement onéreux (haute technicité des personnels et des équipements mis en œuvre).

Une obligation de travailler avec un niveau P4 de confinement suffit, la plupart du temps, à ne pas pouvoir développer les projets de recherche qui étaient envisagé par une équipe donnée. 

2) La Commission du Génie Biomoléculaire : CGB

            En charge de la dissémination dans l’environnement.

            Point important, la CGB existe depuis plus de 21 années (elle a fêtée son vingtième  anniversaire en septembre 2006). Ce qui veut dire et prouve même que l’on s’est préoccupé des risques éventuels des OGM bien avant leur apparition sur le marché et mise en culture à grande échelle.

Cette commission examine donc les dossiers de semenciers désirant effectuer des essais au champ avant même de pouvoir envisager les mettre sur le marché. Ces essais sont nécessaires pour plusieurs raisons et notamment par le simple fait que rien ne peut remplacer une évaluation en milieu réel. Par exemple, la serre, si elle peut apporter des informations, est, de toute façon, un endroit qui ne peut convenir pour extrapoler les résultats dans l’environnement puisque les plantes ne sont pas au contact direct des rayons du soleil. En effet, le verre modifie le spectre solaire.

Ces dossiers doivent contenir de nombreuses informations (dossier SNIF = Summary Notification Information Format), dont les éléments sont disponibles sur le site de la CGB). La CGB, au regard des informations du dossier évalue le risque pour l’environnement et préconise des conditions bien précises (notamment distances d’isolement) pour pouvoir réaliser ces essais. Elle se préoccupe même d’une consommation occasionnelle et ponctuelle de la plante par des promeneurs indélicats.
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                                                              (à suivre)                                                       
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