Le Monde: le quotidien anti-pesticides de référence
Quand le lobby anti-pesticides se paie une page dans Le Monde.
Glyphosate, insecticides néonicotinoïdes…Nous avons subi ces derniers mois un bombardement sans précédent de propagande anti-pesticides. Côté presse écrite subventionnée (1), Le Monde est incontestablement à la pointe de cet étrange combat. Ses journalistes ne prennent même plus un semblant de distance par rapport à la propagande, et les titres des pages Planète reprennent ressemble à s’y méprendre aux slogans des ONG : « Révélations de « Cash Investigation » sur l’agriculture qui tue », « Les députés votent une interdiction des pesticides tueurs d’abeilles », « Une étude a été menée sur 2 000 personnes, grâce à une mobilisation citoyenne et à l’initiative de riverains des zones agricoles ». Dans les articles de Stéphane Foucart traitant du sujet, on échappe rarement au point de vue « éclairé » de François Veillerette, porte parole de Générations Futures. Si l’idéologie verte épousée par le Monde est probablement le reflet des préjugés de son lectorat moyen, il en est aussi la caricature, au point de rendre définitivement obsolète son image de journal de référence.
Compte tenu de la place qu’il continue néanmoins à occuper dans le paysage médiatique français, le lobby anti-pesticides a compris tout l’intérêt d’utiliser Le Monde comme instrument de propagande. Au point de s’offrir une pleine page de pub dans le journal à la veille du vote de l’Assemblée nationale, pour demander aux députés de résister…aux lobbys ! Il fallait oser !
Des débats scientifiques tranchés…dans la salle de rédaction du Monde !
Quand on lit un article de la rubrique Planète du Monde, il ne faut surtout pas s’attendre à un compte-rendu neutre des débats qui traversent la science. Stéphane Foucart tranche pour vous les débats, notamment à coup de « conflits d’intérêts » qui permettent de discréditer les chercheurs qui ne sont pas résolument dans la ligne du parti vert et qui ne partagent pas la phobie anti-"chimie ». Rendant compte d’une étude parue dans Science, il décrète que « la pause du réchauffement climatique était un mirage » (2), mais « oublie » de nuancer son propos en signalant que cette thèse a depuis été contestée, notamment dans un article paru dans Nature Climate Change. Après avoir monté en épingle (3) une étude à la portée très limitée mettant en évidence l’ effet cocktail d’un œstrogène et d’un pesticide (4), voici Foucart qui, volant au secours du documenteur de Cash Investigation sur les pesticides, décrète que l’évaluation des risques d’exposition aux substances « chimiques » dont les pesticides repose «repose sur une science obsolète, battue en brèche par de nouvelles (sic !) notions toxicologiques – effets cocktail, perturbation endocrinienne, programmation prénatale des maladies ».
Espérons qu’une partie des lecteurs du Monde se rendront compte qu’il n’appartient pas à un journaliste de décréter qu’un débat scientifique est clos, ou au contraire que tel ou tel domaine de la science est obsolète.
Et si les pesticides coûtaient plus qu’ils ne rapportent ? Le dernier hoax anti-pesticides du Monde
Après avoir systématiquement entretenu la peur sur l’agriculture qui tue, les néonicotinoïdes tueurs d’abeilles, il ne restait qu’un pas en franchir. Et si les pesticides, qui sont rappelons-le des produits de protection des plantes, ne servaient finalement à rien, et coutaient même plus chers qu’il ne rapportent ? Une étude des 2 chercheurs de l’INRA, aussi longue que fantaisiste, vient de paraitre dans Sustainable Agriculture Reviews et défend cette thèse (6). Une thèse si séduisante, que Stéphane Foucart ne pouvait manquer ne foncer dessus tête baissée. « Et si les pesticides coûtaient plus qu’ils ne rapportent ? » écrit-il dans le Monde du 19/03 . Il ne manque évidemment pas de questionner à ce propos François Veillerette, que l’on sait aussi qualifié en économie qu’en toxicologie.
Selon Stéphane Foucart : « Ce travail de longue haleine, entrepris par deux chercheurs de l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) et publié dans la dernière édition de Sustainable Agriculture Reviews, est le premier à colliger l’ensemble des connaissances disponibles sur ce que les économistes appellent les « externalités négatives » liées à l’utilisation des produits phytosanitaires. Ce fardeau économique, estiment les chercheurs, peut dans certains cas excéder largement les bénéfices offerts par les herbicides, fongicides et autres insecticides.
Selon leurs estimations, le rapport coûts-bénéfices des pesticides de synthèse était ainsi largement défavorable aux Etats-Unis au début des années 1990. Alors qu’ils apportaient environ 27 milliards de dollars (24 milliards d’euros) par an à l’économie américaine, ils pesaient pour au moins 40 milliards de dollars… »
Certes, cela n’est pas parce qu’une étude contredit une intuition qu’il faut la rejeter d’un haussement d’épaule. Nous avons donc parcouru le résultat de ce « travail de longue haleine » pour découvrir la nature et l’ampleur de ces coûts cachés, et là…on hésite entre fou-rire et consternation. Jugeons-en rapidement :
Pour les USA, les auteurs évaluent à 35 Milliards de $ US les couts cachés de l’utilisation de pesticides :
- Premier poste : 18 Milliards de $ censés correspondre au coût des décès par cancers attribuables aux pesticides (2000 par an, chaque vie évaluée à 9 millions d’euros). Même en admettant la réalité de ces 2000 décès, il faudrait en déduire que les 584.000 décès annuels dus aux cancer aux USA coûteraient 5256 milliards de $, soit 29% du PIB américain. En extrapolant, il ne doit pas être difficile de « prouver » que l’ensemble des décès et des maladies chroniques graves coutent à la société américaine …plus de 100% de son produit intérieur brut. C’est dire l’absurdité de ce genre d’estimation.
- Le coût de l’action règlementaire gouvernementale pour évaluer et enregistrer les pesticides , organiser les contrôles et l’application des normes qu’elle édicte, décontaminer les eaux « polluées », pour un total d’environ 5 milliards de $. Le comble étant que ces normes sont la plupart établies non pas en fonction d’un seuil de sécurité sanitaire raisonnable, mais pour répondre aux peurs entretenues autour des pesticides. Il est facile après d’imputer ces coûts aux pesticides.
- Un coût de près de 6 milliards causé par les morts d’oiseaux (7). Il faut dire que les auteurs estiment à 35 $ la valeur de chaque oiseau, dont 5 $ peuvent être compris comme le service écologique qu’ils rendent, les 30 autres $ correspondant à leur valeur … « purement récréative » !
Nous avons gardé le plus drôle est pour la fin (8) : les auteurs rajoutent dans la colonne des coûts des pesticides près de 3 milliards de $ pour le surcoût supportés par les consommateurs qui achètent des produits …bio pour éviter les produits issus de l’agriculture conventionnelle (9) ! Ainsi, le surcoût des produits bio est un coût caché des pesticides. Celle-là, il fallait vraiment la trouver !
Et si on bannissait les pesticides ? Le plaidoyer obscurantiste du Monde.
Cette dernière loufoquerie des deux chercheurs de l’INRA, prise avec le plus grand sérieux dans le quotidien anti-pesticides de référence, a au moins un mérite. De faire réfléchir. Le renoncement aux pesticides de synthèse, une agriculture 100% bio représenterait un surcoût considérable pour les consommateurs. Pas seulement de 20% comme calculé par les auteurs, mais sans doute beaucoup plus élevé en raison des pertes importantes de rendements, et des inévitables tensions sur les prix qui résulteraient d’une moindre disponibilité des denrées alimentaires.
Des considérations impossibles à prendre en compte dans le Monde, qui conclut logiquement dans un grand format : « Et si on bannissait les pesticides ? » (10) . Une fois n’est pas coutume, ça n’est pas à François Veillerette qu’on demande son avis. Qu’on se rassure, on a droit aux leçons de Lydie Bourguignon, à la publicité assumée pour la pseudoscience biodynamique, et au monde des bisounours, les gentils agriculteurs bio qui s’imaginent « faire de la résistance », les AMAP, etc… Bref, tous les clichés boboïsants de l’époque.
Journal de référence, Le Monde ? En tout cas, c’est un bon baromètre de l’hystérie anti-pesticides. C’est mieux que rien.
Anton Suwalki
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(4) les chercheurs on testé 780 combinaisons de produits pris 2 à 2, et en ont trouvé …une seule pour laquelle l’effet combiné des deux produits étaient plus qu’additif…
http://www.nature.com/ncomms/2015/150903/ncomms9089/full/ncomms9089.html
(5) http://www.lemonde.fr/planete/article/2016/02/29/maudits-97_4873354_3244.html
(6) The Hidden and External Costs of Pesticide Use, Denis Bourguet, Thomas Guillemaud, Février 2016
(7) les notes en annexe du tableau donnent d’ailleurs une estimation plus faible (3.5 milliards) . Allez comprendre…
(8) nous faisons court, mais on pourrait discuter de chaque ligne de ce budget à la Prévert
(9) au passage les auteurs font comme si l’agriculture bio n’utilisaient pas des pesticides.