La conférence sur le climat, entre comédie et délire collectif
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La COP 21, késako ? Il s’agit de la « 21e Conférence des parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques ». Vous n’êtes pas plus avancé ? Le site gouvernemental nous en dit plus (1) : « [elle] va rassembler près de 40 000 participants – délégués représentants chaque pays, observateurs, membres de la société civile... Il s’agit du plus grand événement diplomatique accueilli par la France et également de l’une des plus grandes conférences climatiques jamais organisées ».
On comprend que cette grande messe va coûter très cher. Notre président, délaissant l’objectif, sans doute trop minable, d’inverser la courbe du chômage, pourra enfin enfiler un costume digne de sa carrure : celui de sauveur du Monde.
Officiellement, il s’agit donc « d’aboutir, pour la première fois, à un accord universel et contraignant permettant de lutter efficacement contre le dérèglement climatique et d’impulser/d’accélérer la transition vers des sociétés et des économies résilientes et sobres en carbone ».
Mouais, on attend de voir si son bilan dépasse celui des habituelles comédies diplomatiques, contrairement à Ségolène Royal qui annonce avant même la tenue de cette conférence que c’est déjà un succès ! D’ailleurs, confirmant son excellence en économie, elle explique que « 40.000 personnes qui viennent, c'est aussi beaucoup de pouvoir d'achat qui arrive »…
En attendant de connaitre l’issue réelle de la COP21, on peut surtout observer la surenchère délirante à laquelle se prêtent divers groupes et « autres dignitaires chrétiens, sages asiatiques, Indiens d'Amazonie ou philosophes occidentaux, des dizaines d'autorités morales du monde entier ( )réunies mardi à Paris pour un "sommet des consciences" sur le climat » mobilisés par François Hollande. Du coup, elle parait bien loin, la « laïcité exigeante » affichée après les attentats de janvier 2005.
Quand les "sages" donnent dans l’outrance
Côté sagesse asiatique, on peut remarquer un de ses représentants (Matthieu Ricard) parmi les signataires d’un appel « à en finir avec les crimes climatiques ». A la lecture de cet appel vibrant, on s’aperçoit vite que la sagesse ne rime pas forcément avec raison et sens de la mesure. Et on ne peut qu’être triste de constater que des climatologues influents, côtoient de parfaits obscurantistes.Et qu'ils aient signé un texte outrancier qui comporte en outredes contre-vérités scientifiques, telles que « la submersion [déjà observée] des îles du Pacifique Sud,[ou] la recrudescence des tempêtes et ouragans ».On passera sur l'affirmation très douteuse concernant les réfugiés climatiques...
Aucune ile n’a été submergée, et les observations récentes des marégraphes ne soutiennent nullement la thèse d’une submersion imminente des îles du Pacifique Sud (4). Dans bien des stations de la région, il n’y a même pas de tendance significative à la hausse du niveau de la mer. Et à part (sans doute) en Atlantique Nord, on n’observe pas de recrudescence, ni de violence accrue des tempêtes et des ouragans depuis les années 1970..Et celà, c'est le GIEC (AR5) qui le dit.
Au-delà de ces « détails », on pourrait espérer, même de la part de gens convaincus de la nécessité de réduire les émissions de CO2, qu’ils ne versent pas dans la folie : car proclamer que la consommation de pétrole est un crime alors qu’il est à la base même de notre développement et qu’on lui ne connaît pas, à ce jour, de substitut (5), c’est de la folie pure et simple. Renoncer à exploiter les ressources fossiles à l’heure actuelle signifierait la misère absolue, bien pire que si le pire des scénarios climatiques se réalisait. Enfin, lorsque ce « crime » est assimilé à l’esclavage, le totalitarisme, le colonialisme ou l’apartheid, la folie des auteurs devient carrément de l’indécence.
Ce genre de reductio at Hitlerum est d’ailleurs une figure rhétorique particulièrement prisée des extrémistes climatiques, qui n’omettent pas dans ce texte de pourfendre les « climato négationnistes ». En son temps, James Hansen, célèbre climatologue de la NASA, comparait les convois de charbon aux trains qui emmenaient les juifs vers les camps de concentration…
Les adorateurs de la Terre Mère s’en mêlent
On apprend aussi qu’à côté de la COP 21, se tiendra un « Tribunal International des Droits de la Nature » (6). « Le Tribunal propose une alternative systémique à la protection environnementale, en reconnaissant aux écosystèmes leurs droits à l’existence, au maintien, à la préservation et à la régénération ; et aussi que ces droits puissent être revendiqués en Justice ». Ces mythes conservateurs, qui fantasment des écosystèmes parfaitement figés (7) sans l’intervention de l’homme, ne visent donc que ce dernier. Et comme j’imagine mal la mare à côté de chez moi porter plainte pour faire valoir son droit à l‘existence et à la préservation, des êtres humains se chargeront d’évaluer ses souffrances, et de condamner en son nom : « un panel de juristes et de personnalités internationalement reconnus sur le thème de la justice planétaire statueront sur des cas emblématiques tels que le changement climatique, les OGM, les méthodes extractivistes (sic !)et d’autres violations environnementales ». Le délire qui consiste à doter un écosystème de la personnalité juridique unilatérale (des droits, mais évidement pas de devoirs), est manifestement l’alibi de gens pressés de dresser des potences : « [le Tribunal] formulera des jugements et recommandations dans une perspective de protection et de restauration de la Terre en se fondant sur la Déclaration Universelle des Droits de la Terre Mère. Cette déclaration définit entre autres les devoirs incombant à l’humanité afin de respecter l’intégrité des cycles écologiques vitaux de la planète. De ce fait, la Déclaration promeut la proposition d’amendements au Statut de la Cour Pénale Internationale permettant la reconnaissance du crime d’écocide ».
Jusqu’à récemment, on imaginait que ce genre de discours n’était que le fait d’une poignée d’illuminés. Il nous faut déchanter : on l’a déjà entendu à l’ONU (8), et dans le cas présent, ATTAC France fait partie des organisateurs…
Et maintenant, le retour de la « bombe P »
Comme on l’a vu dans l’appel, l’urgence climatique semble justifier aux yeux de ses promoteurs des alliances assez improbables. Alors, quand le Pape prétend lui aussi se mêler de changer le climat, même des médias a priori plutôt anticléricaux ne vont pas s’en plaindre. Sylvestre Huet, de Libération semble avoir trouvé un compromis : « Pape François : élève appliqué mais peut mieux faire », explique-t-il en rendant compte d’un commentaire de l’encyclique papale parue dans Nature Climate Change. Le ton adopté par le journaliste semble indiquer qu’il adhère aux thèses des auteurs, le célèbre Paul Ehrlich, et un certain John Harte.
« [Ceux-ci] font en revanche remarquer au chef de l’Église catholique une contradiction majeure entre son discours sur l'action à conduire pour éviter un dérapage climatique dangereux et celui qu'il tient sur la contraception et le contrôle des naissances. Et l'appellent à abandonner l'obsession de l’Église catholique sur la contraception et l'avortement, et de soutenir les droits des femmes et le planning familial ».
C’est la première fois, me semble-t-il que Huet manifeste, derrière une critique d’une position effectivement réactionnaire du Pape, une vision malthusienne qui l’est tout autant. Car si la contraception est évidemment une belle invention lorsqu’elle évite aux femmes des grossesses non désirées, elle devient tout autre chose entre les mains de ceux qui veulent en faire un instrument politique. Et ceci est bien l’obsession d’Ehrlich depuis près de 50 ans.
J’imagine que Sylvestre Huet a lu la Bombe P, paru en 1968, peu après un voyage d’Ehrlich en Inde qui semble l’avoir profondément traumatisé. Dans ce livre, celui-ci prédit l’épuisement imminent des ressources liés à la pression démographique et aux pollutions engendrées par celle-ci et notre mode de production, des famines massives peut-être dès les années 1970, et « certainement à partir de 1980 », et tout un tas d’autres fléaux, y compris dans les pays « surdéveloppés ». Les USA devaient mourir de soif à partir de 2004, selon ses calculs. A défaut d’un contrôle strict et généralisé de la natalité sur la planète, la régulation démographique se fera donc par la mortalité. Une reprise pure et simple des thèses de Thomas Malthus, formulées près de deux siècles plus tôt.
Difficile de se planter autant qu’Ehrlich, Huet ne peut l’ignorer : depuis, la population mondiale a été multipliée par plus de deux (de 3,5 Milliards d’humains à 7,3 aujourd’hui). Dans le même temps, la population sous-alimentée a reculé, tant en termes relatifs (passant de 33% en 1970 à 11% aujourd’hui, selon la FAO) qu'absolus. 11% de personnes souffrant de la faim, cela reste intolérable, bien sûr. Mais cela signifie que contrairement aux prédictions apocalyptiques d’Ehrlich, la terre a pu nourrir convenablement plus de 4 milliards d’être supplémentaires, sans que cela passe par une sobriété généralisée, plus ou moins volontaires. Le PIB mondial a été multiplié par 5 depuis la « Bombe P ».
Entre temps (cf. figure), la natalité a nettement baissé, malgré l’absence de contrôle généralisé des naissances, sauf dans la Chine maoïste (12).
Malgré ce fabuleux plantage, qui appellerait à un peu de modestie, Ehrlich et son collègue persistent et signent, et Huet suit. Cette fois-ci, c’est l’urgence climatique qui justifierait d’abandonner « «la fiction d'une croissance [démographique] perpétuelle», prouvant qu’ils n’ont toujours rien compris aux lois démographiques.
Que ce soit dans un sens restrictif ou au contraire populationniste, la volonté de contrôler la démographie est toujours suspecte. Certes, Ehrlich ne prône pas ouvertement des solutions autoritaires. Mais on peut craindre que faire des enfants s’ajoute bientôt à la liste des « crimes climatiques » dénoncés avec la légèreté d’un char Panzer par les « grandes consciences » et autres adorateurs de la Terre-Mère.
Anton Suwalki
- http://www.cop21.gouv.fr/fr/cop21-cmp11/enjeux-de-la-cop21
- http://www.rtl.fr/actu/politique/cop-21-segolene-royal-irritee-par-les-inquetudes-de-claude-bartolone-7779587489
- http://www.sudouest.fr/2015/07/21/rechauffement-climatique-avant-la-cop-21-paris-reunit-les-consciences-2059609-710.php
- http://www.psmsl.org/data/obtaining/map.html
- ,à part dans le domaine de la production d’électricité pour lequel le nucléaire est le meilleur candidat, mais parmi les pétitionnaires figurent bien entendu des anti-nucléaires !
- http://www.maisondesmetallos.org/2015/07/22/tribunal-international-des-droits-de-la-nature
- lire à ce propos : L’écologie est-elle encore scientifique ? Christian Lévêque, Éditions QAE
- http://imposteurs.over-blog.com/article-debat-sur-la-terre-nourriciere-l-onu-en-folie-73701530.html
- http://sciences.blogs.liberation.fr/home/2015/09/pape-et-climat-peut-mieux-faire.html
- http://www.nature.com/nclimate/journal/v5/n10/full/nclimate2795.html
en accès payant
http://imposteurs.over-blog.com/article-20739778.html
(12) on peut quand même concéder que la politique de l’enfant unique dans les années 70 en Chine a renforcé cette tendance.